Page 11 - TESTARD_Claude
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françaises et le doyen d'âge de l'Académie. La gloire de la littérature est en effet
                 plus tranquille mais est-elle toujours aussi pure ?

                 Dans un changement de gouvernement, l'ambition à défaut de mérite, fait du zèle
                 et  dénigre  ses  rivaux  pour  les  supplanter  aux  rayons  du  soleil  levant.  A  cette
                 époque, la contagion atteignit l'armée et Claude TESTARD faillit, plus d'une fois, en
                 être  victime.  On  chercha  secrètement  à  rendre  suspecte  sa  fidélité  au  pouvoir
                 nouveau. Il éprouvait sans doute des regrets, mal dissimulés par sa franchise, pour
                 un passé auquel le rattachait la communauté de la gloire et des malheurs. Mais,
                 avant tout, il était l'homme de son pays, le soldat de la France et incapable de
                 manquer à ses nouveaux serments. Bientôt, on s'en prit à sa probité, et on l'accusa
                 d'avoir gaspillé, dans le jeu, la caisse du régiment dont il était dépositaire. Son
                 général  savait  bien  qu'il  ne  jouait  pas,  mais,  obéissant  à  des  ordres  venus  du
                 ministère, il fut obligé de lui donner connaissance de la lettre accusatrice. Claude
                 TESTARD ne répondit rie. Il rentra chez lui et revint aussitôt une bourse à la main.
                 "Tenez, mon Général, en la jetant sur la table, comptez et vous verrez que si je
                 perds de l'argent, ce n'est pas le vôtre !" Il n'y manquait pas un centime. L'orage
                 passa donc sans l'abattre, peut-être mieux, la calomnie le fit mieux apprécier en le
                 faisant mieux connaître.

                    er
                 Le 1  avril 1816, Louis XVIII lui donne la décoration de l'Ordre de Saint Louis, le
                                                                           er
                                           er
                 nomme Lieutenant-colonel au 1  Régiment d'artillerie de marine. Du 1  octobre
                                                                       er
                 1816 çà 1823, il prend le commandement des bombardiers du 1  bataillon des
                 Troupes de l'Artillerie de marine, sur les batteries de la rade de Brest et de celle de
                 Toulon.


                 Tant de fatigues exigent enfin un repos bien mérité, Claude TESTARD est admis à
                 la retraite le 19 mars 1823 après 38 ans 7 mois et 9 jours de service. Il est tout jeune
                 marié,  depuis  le  15  janvier,  à  Marie  Catherine  GUILLEROT,  fille  d'un  ancien
                 brigadier de gendarmerie. Il vient s'installer à Seine-Port en 1839, il réside rue de
                 Seine  à  Seine-Port,  propriétaire,  avec  sa  femme  et  sa  belle-sœur,  Henriette
                 Arsenie. Il est voisin direct de Virginie DEJAZET. En 1851, le foyer s'est agrandi avec
                 la venue d'une nièce, Ernestine ROUET, 25 ans, et de Mlle Marie Louise Renée
                 HAMEL, une rentière de 79 ans. Marguerite Ernestine ROUET est la fille de sa nièce,
                 Marie  Clarisse  MASSICOT,  issue  du  premier  mariage  de  Justine  avec  Silvain
                 MASSICOT.

                 Madame TESTARD, vraie sœur de charité dans le mariage et oublieuse d'elle-même
                 pour penser aux autres, ne connut qu'une chose : dépenser sa vie au bonheur de
                 son  époux,  aux  soins  de  sa  sœur  malade,  au  soulagement  des  pauvres,  au
                 pansement des infirmes. Sa maison était devenue un petit hôpital, dont on ne
                 sortait  qu'avec  l'aumône  corporelle,  toujours  accompagnée  de  l'aumône  plus
                 précieuse encore d'une parole chrétienne qui relève le cœur.
                 Le  vieux  colonel  approuvait  toutes  les  charités  de  sa  sainte  femme,  il  en  était
                 heureux.    Et  pourtant,  cet  homme,  retraité  à  une  époque  défavorables  aux
                 retraites, cet homme dont quelques intimes avaient été ministres, et qui s'était
                 alors servi de son crédit en faveur des autres, n'avait jamais rien demandé pour lui-
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