Page 4 - Notice de la fête à Saint Assise
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serment à prêter par les officiers et gardes nationales, conformément au décret de l'assemblée nationale du 16 mars
               dernier, et l'a fait prêter en ces termes :

               "Jurez-vous d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi, de maintenir, de tout votre pouvoir, sur la réquisition des
               corps  administratifs  et  municipaux,  la  constitution  du  royaume,  et  de  prêter  pareillement,  sur  les  mêmes
               réquisitions, main-forte à l'exécution des ordonnances de justice et à celles des décrets de l'assemblée nationale,
               acceptés et sanctionnés par le roi ?"
               "Je le jure", a répondu aussitôt M. le commandant en chef, en tenant son arme étendue sur les mains des maires
               des deux paroisses, et "nous le jurons" ont ajouté les officiers, formant voûte d'acier et tous les soldats présentant
               leurs armes ; après quoi, a suivi l'accolade, donnée par ledit sieur commandant, tant aux maires des deux paroisses,
               qu'aux officiers des trois compagnies.
               Aussitôt, le tambour battant aux champs, toute la troupe s'est remise en ordre de marche, et a continué la route
               jusqu'à l'église, où, étant arrivée, M. le curé de Saint-Port, après l'aspersion de l'eau bénite, s'est avancé sur les
               marches de l'autel, revêtu de l'aube et de l'étole, pour procéder à la bénédiction du drapeau : mais avant cette
               pieuse et auguste cérémonie, trois discours ont été prononcés et écoutés avec des applaudissements universels.

               D'abord, M. le commandant en chef, prenant la parole, a dit :
               "Vous avez donné, messieurs et chers camarades, un exemple bien touchant de votre amour pour la liberté, le jour
               où vous vous êtes unis de cœur et de sentiment au serment prononcé sur l'autel de la patrie par tous les confédérés
               de l'empire français, pour le maintien de la constitution ; consacrons plus intimement encore, s'il est possible, cette
               époque mémorable, en déployant, pour la première fois, ce drapeau, signe de notre union et de nos forces, sur
               lequel nous allons jurer de défendre notre liberté, et de verser, jusqu'à la dernière goutte de notre sang, pour
               protéger l'exécution des décrets de la loi : qu'elle soit toujours la règle de nos actions : vous donnez l'exemple de la
               soumission  et  de  l'obéissance  due  à  ses  dignes  interprètes  dans  ce  canton,  sera  le  premier  de  mes  devoirs  ;
               concourons de toutes nos forces au maintien de la tranquillité, de la sûreté des citoyens et de leur propriété ; il m'est
               doux, dans ce moment, d'être appelé, par le vœu de mes concitoyens, par mes chers camarades, à l'honneur de les
               commander ; restons à jamais unis, aimons-nous comme frères, secourons-nous comme amis, soyons toujours
               animés des mêmes sentiments, et signalons-en l'expression par des cris bien chers à des cœurs vraiment patriotes
               et français, vive la nation, vive la loi, vive le roi".
               Monsieur le curé de Saint-Port, ensuite, mêlant à la noble voix du patriotisme le langage encore plus sublime de la
               religion, dont il est le digne ministre, a exhorté toute cette troupe de soldats-citoyens à sanctifier, par la piété, l'usage
               de leurs armes, et à consacrer au Dieu de paix et de miséricorde ces mêmes armes, qu'ils n'avaient prises que pour
               le maintien de la tranquillité publique, et pour le bonheur commun de tous les Français.
               Enfin, M. GAUTIER, curé et maire de Cesson, dans son discours consacré particulièrement à l'amour de la patrie,
               s'est attaché à peindre la douceur et l'énergie de ce sentiment noble et généreux ; et, pour l'affermir et le perpétuer
               dans le cœur de tous les auditeurs, il a tracé, d'une main vigoureuse, le double tableau de la France autrefois esclave,
               et libre aujourd'hui ; et, après leurs avoir représenté qu'ils avaient commencé à jouir des droits de citoyens, à dater
               du jour où ils avaient concouru eux-mêmes à la formation de leurs lois, il en a conclu que, par cet acte même, ils
               avaient contracté l'engagement le plus sacré de les respecter, de les chérir, et de s'y soumettre avec docilité ; et que
               de là dépendait la fiabilité de l'empire, et leur propre félicité.

               Ces discours finis, des cris redoublés de vive la nation, vive la constitution, vive le roi, se sont fait entendre de toutes
               parts, et aussitôt M. le curé de Saint-Port a fait la bénédiction du drapeau, avec les cérémonies d'usage, et prescrites
               par le rituel ; il a ensuite donné l'accolade à l'officier qui le portait ; et, à l'instant, cette enseigne sacrée, déployée
               avec éclat, a fait voir à tous les yeux le signe auguste et respectable qui doit à jamais unir les soldats-citoyens des
               deux paroisses de Cesson et Saint-Port, et leur servir de guide, à la voix de leur chef, dans toutes les nécessités ou
               les fêtes de la patrie.
               La messe a ensuite été célébrée, pendant laquelle on a chanté en chœur le Domine salvum sacregem ; les vêpres
               ont suivi immédiatement ; et, après ces devoirs religieux d'adoration, de reconnaissance et d'amour à l'Etre suprême,
               les compagnies des gardes nationales ont défilé, se sont mises en ligne, et en ordre de marche, comme elles étaient
               venues, les officiers municipaux placés derrière le drapeau, et se sont ainsi rendues à Saint-Assize, demeure de M.
               le commandant en chef, pour remettre entre ses mains et à sa garde, ledit drapeau, et assister ensuite au repas
               militaire et fraternel qui était préparé pour les recevoir.

               A cet effet, au côté droit du château, sous une allée longue et spacieuse de marronniers épais et touffus, et en face
               de la rivière de la Seine, était dressée, en forme de fer à cheval, une table d'environ trois cents couverts, toute garnie
               de mets et de bouteilles, formant le plus magnifique coup d'œil, mais qui a paru bien plus touchant encore, lorsque
               cette table a été environnée de tous les convive, parmi lesquels se trouvaient, non seulement les officiers et gardes
               nationales des deux paroisses, mais encore un grand nombre d'autres, venus tant de la ville de Melun, que des
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